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« Éthique et droit »

Emmanuelle Marceau (Université de Montréal), chercheuse associée du CRÉ, publie un nouvel article intitulé « Éthique et droit », paru dans Lex Electronica (dirigée par Vincent Gautrais). L’article fait partie d’un numéro spécial titré Dictionnaire de la norme : formaliser l’informel, dont l’objectif est d’examiner les multiples variations terminologiques autour de la notion de norme.

Résumé

Plusieurs soulignent que le droit se complexifie (GAUTRAIS, 2024), tout en s’imposant dans les sociétés démocratiques comme la voie suprême de résolution des conflits. De fait, le droit est devenu progressivement le principal référentiel des sociétés contemporaines au point où certains qualifient ce phénomène de « colonisation » du monde par le droit (HABERMAS, 1997). Malgré toute l’autorité et la place qu’occupe le droit au sein des sociétés occidentales, plusieurs reconnaissent du même souffle que le droit traverse également une crise (BELLEY, 2002 ; MEKKI, 2009 ; OTIS, 2005 ; THIBIERGE, 2009), de sorte que le droit peine à assouvir ses finalités de régulation sociale. Par exemple, le problème coriace de l’accès à la justice demeure entier (NOREAU, 2010), tout comme ceux des délais, des coûts, de la polarisation des parties, pour n’en nommer que quelques-uns (OTIS, 2001). Face à ces difficultés récurrentes et persistantes, le droit se transforme. Pour reprendre les propos introductifs du Dictionnaire de la norme, le droit « (…) fait montre d’une évolution profonde dans la manière de le dire et de le faire » (GAUTRAIS, 2024, p. 1). C’est précisément à cette manière de « dire et de faire » le droit, par le prisme de son rapprochement à l’éthique, que nous nous attardons dans le présent texte. Face aux écueils du système juridique traditionnel, nous souhaitons aborder le « passage du gouvernement à la gouvernance » (SUPIOT, 2015, Partie 1, chapitre 1, cité dans GAUTRAIS, 2024, p. 2), soit l’émergence d’une normativité hétérogène, l’ « érosion des concepts » (GAUTRAIS, 2024), voire la fonte de concepts, par l’examen du rapprochement du droit et de l’éthique que nous qualifions d’éthicisation du droit. Car force est de reconnaître que les alternatives que proposent les modes de prévention des différends (PRD) qui misent sur une plus grande accessibilité et satisfaction des parties et au final, d’une plus grande justice (OTIS, 2001 ; ROBERGE 2023), ou encore, le droit mou, qui offre une nouvelle autonomie aux destinataires de la norme et une nouvelle forme de fonctionnement, plus décentralisée (MEKKI, 2009), s’inscrivent dans une tendance profonde et fondamentale de transformation du droit qui le rapproche de l’éthique.